En ce début du mois de septembre 2017, la Cour de Justice de l’Union Européenne a rendu un arrêt très important concernant la manière de calculer les distances prises en compte pour le calcul des compensations statutaires dues en vertu du Règlement UE 261/2004. Un arrêt important qu’il nous est apparu opportun de commenter.
Cet arrêt a pour origine un litige entre Mesdames Birgit Bossen, Anja Bossen et Gudula Gräßmann contre Brussels Airlines SA/NV.
Mesdames Birgit Bossen, Anja Bossen et Gudula Gräßmann se sont rendues de Rome à Hambourg via Bruxelles, au moyen d’un vol opéré par Brussels Airlines.
Leur vol est arrivé à Hambourg avec un retard d’une durée de trois heures et cinquante minutes par rapport à l’heure d’arrivée initialement prévue.
Elles ont donc saisi l’Amtsgericht Hamburg (tribunal de district d’Hambourg, Allemagne) afin d’obtenir l’indemnisation prévue par le règlement de l’Union Européenne sur l’indemnisation des passagers aériens (1).
Ce règlement, tel qu’interprété par la Cour de justice, dispose notamment que, en cas de retard d’une durée de trois heures ou plus, les passagers ont droit à une compensation de 250 euros pour les vols de 1 500 kilomètres ou moins et de 400 euros pour les vols de plus de 1 500 kilomètres reliant deux États membres.
Dans ce contexte, la juridiction allemande demande à la Cour si :
– dans le cas d’un vol effectué avec correspondance, la distance totale du vol correspond à la distance entre l’aéroport de départ et l’aéroport d’arrivée (à savoir en l’espèce 1 326 km entre Rome et Hambourg)
– …ou bien si elle doit être calculée en fonction de la distance effectivement parcourue (à savoir en l’espèce 1 656 km, c’est-à-dire 1 173 km pour la distance entre Rome et Bruxelles et 483 km pour celle entre Bruxelles et Hambourg).
De la réponse à cette question dépendra le montant de l’indemnisation due aux passagers concernés.
La décision de la Cour constate tout d’abord que, dans le cadre du droit à l’indemnisation, le règlement ne distingue pas selon que les passagers concernés atteignent leur destination finale au moyen d’un vol direct ou d’un vol avec correspondance.
La Cour en conclut que, dans les deux cas, les passagers doivent être traités de manière égale lors du calcul du montant de l’indemnisation.
Il en ressort donc que, dans tous les cas, il conviendra de calculer la distance telle que « vol d’oiseau ».
Quelques remarques opérationnelles importantes :
1. On prendra en compte pour le calcul non pas les villes de départ et d’arrivée mais bien les aéroports.
A cet égard, il est bon de rappeler quelques exemples de « fausses » dénominations d’aéroports comme Brussels South qui en fait est Charleroi à 60 km de Bruxelles, ou encore Paris-Vatry qui est à plus de 100 km de Paris. Ces erreurs de dénomination pouvant alors impacter sur le calcul des distances.
2. Le calcul des distances n’a aucune incidence sur les mesures d’assistance en vertu du Règlement, à savoir que le client pourra toujours choisir celle qui lui convient le mieux.
3. Lorsque le Règlement Européen est d’application, ses dispositions prévoient que les passagers ayant un vol annulé, pour quelque raison qui soit, ont droit à des mesures d’assistance telles le réacheminement sur un autre vol le plus rapidement possible ou à leur demande le remboursement de leurs vols ainsi que les vols de correspondance devenus inutiles !
4. Ceci est très important car souvent les compagnies tentent de ne rembourser que le vol ayant été annulé de facto.
De plus, les mesures d’assistance incluent aussi l’hébergement et les repas si le vol re-routé part le lendemain. Là aussi, nombre de transporteurs tentent de s’exonérer de cette obligation.
Il est très important de noter que, par exemple, un passager effectuant un vol Madrid/Bruxelles/New York et bloqué à Bruxelles devra donc se voir offrir un hébergement et un réacheminement vers New York OU, s’il le demande, un remboursement pour tout le voyage vol Madrid/Bruxelles inclus.
Dans le cas d’un aéroport de départ ou de destination autre que celui initialement prévu, le transporteur devra prendre en charge les passagers. Ceci est donc valable pour les changements d’aéroports.
Article 8 – Assistance : droit au remboursement ou au réacheminement
1. Lorsqu’il est fait référence au présent article, les passagers se voient proposer le choix entre :
a) – le remboursement du billet, dans un délai de sept jours, selon les modalités visées à l’article 7, paragraphe 3, au prix auquel il a été acheté, pour la ou les parties du voyage non effectuées et pour la ou les parties du voyage déjà effectuées et devenues inutiles par rapport à leur plan de voyage initial, ainsi que, le cas échéant,
– un vol retour vers leur point de départ initial dans les meilleurs délais ;
b) un réacheminement vers leur destination finale, dans des conditions de transport comparables et dans les meilleurs délais, ou
c) un réacheminement vers leur destination finale dans des conditions de transport comparables à une date ultérieure, à leur convenance, sous réserve de la disponibilité de sièges.
2. Le paragraphe 1, point a), s’applique également aux passagers dont le vol fait partie d’un voyage à forfait hormis en ce qui concerne le droit au remboursement si un tel droit découle de la directive 90/314/CEE.
3. Dans le cas d’une ville, d’une agglomération ou d’une région desservie par plusieurs aéroports, si le transporteur aérien effectif propose au passager un vol à destination d’un aéroport autre que celui qui était initialement prévu, le transporteur aérien effectif prend à sa charge les frais de transfert des passagers entre l’aéroport d’arrivée et l’aéroport initialement prévu ou une autre destination proche convenue avec le passager.
*Me David Sprecher est avocat spécialisé dans le droit du tourisme et de l’aviation civile et par ailleurs avocat du CEDIV.
Il est Senior Lecturer en droit du tourisme et de l’aviation civile au sein d’universités et écoles supérieures de commerce et également référent en régulation aérienne pour institutions et Parlement.
Les informations contenues dans cet article ne peuvent en aucun cas servir de conseils juridiques et tout lecteur doit recourir aux services d’un avocat avant d’engager toute action.
Le texte du Règlement Européen 261/2004 est disponible aux professionnels du tourisme sur simple demande à david.sprecher@sprecher.co.il
Source :/www.tourmag.com, Rédigé par Me David SPRECHER le Lundi 11 Septembre 2017
http://www.tourmag.com/Indemnites%C2%A0-les-correspondances-ca-compte-pas-pour-du-beurre_a88902.html